samedi 4 décembre 2010

Côte-d'Ivoire: Gbagbo, battu par Ouattara, a été investi Président

Libération.fr - Laurent Gbagbo contre le reste du monde. La victoire du chef de l'Etat sortant étant rejetée par la communauté nationale, ce dernier semble décidé à croiser le fer avec elle, à coups d'imprécations et de menaces. La meilleure preuve: Laurent Gbagbo s'est fait investir ce samedi à la présidence ivoirienne.

De son côté, Alassane Ouattara a prêté serment «en qualité de président de la République de Côte d'Ivoire» par un courrier au Conseil constitutionnel dont l'AFP a obtenu samedi copie.
Peu auparavant, le Premier ministre ivoirien Guillaume Soro avait annoncé qu'il reconnaissait Alassane Ouattara comme président, et qu'il allait remettre la démission de son gouvernement. «Nous reconnaissons que M. Alassane Ouattara est le vainqueur de cette élection, a-t-il déclaré devant la presse à Abidjan. J'ai décidé d'aller lui rendre la démission de mon gouvernement et ma démission en tant que Premier ministre.»
Chef de l'ex-rébellion des Forces nouvelles (FN) qui contrôle le nord du pays depuis le putsch manqué de 2002, Guillaume Soro était devenu en 2007 Premier ministre de Laurent Gbagbo après avoir conclu avec lui l'accord de paix de Ouagadougou.

Soro: «injuste et inacceptable»,

Guillaume Soro a jugé «injuste et inacceptable» la décision du Conseil constitutionnel de proclamer Gbagbo vainqueur en invalidant les résultats de la commission électorale qui donnaient son rival en tête:«Notre position est de soutenir la proclamation faite par la Commission électorale indépendante et la certification (validation, ndlr) faite par les Nations unies.»
Vendredi après-midi, après avoir annulé le vote des électeurs dans neuf départements de la moitié nord du pays, le Conseil constitutionnel a déclaré Laurent Gbagbo vainqueur de l'élection présidentielle du 28 novembre avec 51% des voix contre 49% à Alassane Ouattara.
Moins de deux heures plus tard, le représentant des Nations unies en Côte d'Ivoire, Youn-Jin Choi, chargé de certifier le scrutin, assurait à l'inverse que l'opposant l'avait emporté, comme l'avait indiqué le président de la Commission électorale indépendante la veille.
Dans la foulée, la victoire d'Alassane Ouattara a été reconnue par le secrétaire général des Nations unies, Ban-ki Moon, par l'Union européenne, mais aussi par Nicolas Sarkozy et Barack Obama.

Menaces

La riposte du régime ivoirien ne s'est pas faite attendre. Sur le plateau du journal télévisé de 20 heures de la chaîne nationale (RTI), un proche conseiller de Laurent Gbagbo, Alcide Djédjé, a menacé d'expulsion de représentant de l'Onu, avant de se lancer dans une violente diatribe contre l'organisation internationale, accusée de ne pas respecter la souveraineté de la Côte d'Ivoire. Il a accusé le diplomate, mandaté par le Conseil de sécurité, d'«incitation à la violence» et d'être un «agent de déstabilisation».
Ambassadeur de Côte d'Ivoire auprès des Nations unies, Alcide Djédjé n'a pas hésité à qualifié l'ONU d'«institution de combines», où les Etats les plus puissants défendraient avant tout leurs intérêts.
Depuis le scrutin du 28 novembre, le clan présidentiel multiplie, par ailleurs, les intimidations envers les médias et les ressortissants étrangers. Vendredi, un porte-parole de l'armée a prévenu, à la télévision, que des imposteurs vêtus de tenue militaire auraient prévu d'attaquer «des intérêts français», sans donner plus de précision. Près de 14 000 Français, dont une moitié de binationaux, résident en Côte d'Ivoire.
Enfin, la RTI a consacré une bonne partie de son journal télévisé à dénoncer les agissements de la presse française. Exhibant une photo de la correspondante de France 24 à Abidjan, elle a accusé la chaîne française de vouloir déstabiliser le pays en ayant relayé la proclamation des résultats provisoires par le président de la CEI qui donnent vainqueur Ouattara.

«Campagne de dénigrement et de suspicion»

Depuis jeudi, la diffusion des chaînes françaises a été suspendue par les autorités locales. La présentatrice du JT a, ensuite, lu un communiqué dénonçant «une campagne de dénigrement et de suspicion» menée par des journalistes français «donneurs de leçons» dès qu'il s'agit d'Afrique. Un texte signé par deux députés... français: les socialistes François Loncle et Henri Emmanuelli.
En octobre 2003, dans un climat de haine antifrançaise entretenu par la presse proche du régime de Laurent Gbagbo, un policier avait tué à bout portant le correspondant de RFI à Abidjan, Jean Hélène.

Source Libération.fr / Photo Reuters


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